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La patience et la rage
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Le vrai virtuose du logos

Le vrai virtuose du logos

Portrait de Dostoievski au Marker, par Marc-Édouard Nabe (2009)

Portrait de Dostoievski au Marker, par Marc-Édouard Nabe (2009)

De plus en plus d'articles et de livres analysent les ressorts mentaux et sociaux du complotisme contemporain. Mais Nabe est le seul à pouvoir nous raconter comment les membres de la "dissidence" sont devenus complotistes. En effet, il a connu de près Soral, Dieudonné, Laïbi (alias Le Libre Penseur) et les autres, qu'il a fréquentés au début des années 2000. Il a donc pu assister à leur chute dans la folie paranoïaque. C'est ce qu'il racontait dans le tome 1 des Porcs, qui allait de son émission télé avec Dieudonné en 1999 jusqu'à novembre 2010 : Nabe a alors l'espoir de gagner le Renaudot pour L'Homme qui arrêta d'écrire ; au même moment, Soral, vexé que Nabe ne le suive pas dans le complotisme, signe dans Flash un article très violent contre Nabe, ce qui marquera la rupture entre les deux amis.

Ce tome 2 commence aussitôt après, quand Nabe apprend qu'il a raté le Renaudot et il s'arrête en mars 2012, au moment où Mohammed Merah commet ses tueries à Toulouse avant d'être abattu par le RAID. Dans ce tome, on découvre comment Nabe tente de détourner Dieudonné de l'influence de Soral et comment il finit par échouer. Plus Dieudonné grossit, plus il se dégonfle. À la fin, il n'est qu'une baudruche pitoyable. Dans une belle histoire, tout finirait par un mariage et des chansons, mais ici les chansons sont minables et le mariage est pour ainsi dire faux. 

Cette intrigue constitue le fil conducteur du livre, dont le sujet est plus largement le développement du complotiste et son succès grandissant sur Internet. Nabe reproduit régulièrement, sur des pages entières (sur du précieux et beau papier !), des dizaines de messages d'internautes anonymes qui adulent les « dissidents » et vomissent leur haine sur Nabe. Leurs messages, écrits dans un français le plus souvent calamiteux, nous montrent comment le complotisme rend fou ! Dans les Porcs, les héros sont légions, comme l'esprit est légion chez le possédé de Gerasa qui donne son titre au livre (j'ai détaillé les références dans mon article sur le tome 1) ; mais ces héros sont anonymes et n'ont rien d'héroïque. 

On s'aperçoit que dès 2011, alors que la « dissidence » était en pleine ascension et que Soral faisait des vidéos de plus de 4h sur son canapé rouge, Nabe était déjà très au courant des principales théories complotistes. Là où Soral monologue, Nabe au contraire offre la parole au plus large éventail possible de personnages, et au lieu de rester collé à un canapé, il se déplace pour enquêter sur les complotistes. Dans ce livre construit tout entier sur le principe dostoievkien de la polyphonie, il s'affirme comme le vrai virtuose de la parole et comme le grand écrivain d'une époque qui, décidément, ne le mérite pas. 

*

Nabe a expliqué lui-même comment il a conçu ce tome dans cette vidéo de présentation, il serait donc inutile de le répéter et de le paraphraser lorsqu'il qualifie son livre de « pamphlet choral ». L'artiste est sans doute, comme le pense Baudelaire, le meilleur des critiques, et sans doute l'écrivain est-il le meilleur lecteur de son livre. Je me contenterai de dire ce que j'ai trouvé de plus remarquable dans ce tome 2. 

D'abord, les différents fils narratifs présents dans le tome 1 en viennent à se nouer les uns aux autres pour former un tout, comme une tresse ; c'est la raison pour laquelle je parlerais d'une composition tressée. 

Un personnage vient, disparaît pendant plusieurs chapitres puis réapparaît plus loin, comme des cheveux qui passent dessus-dessous pour former une tresse : par exemple, un ami de Nabe, Pierre Robin, ancien du GUD et amateur de Brasillach, apparaît dans un des premiers chapitres : on ne voit pas tout de suite son rapport avec la dissidence ; mais dans le dernier tiers du livre, après plusieurs apparitions récurrentes, il avoue sa participation à un groupe de désinformation pro-Bachar, chargé de masquer les crimes de ce dernier sur le peuple syrien.

Nabe place ainsi ses personnages, comme un romancier ou un dramaturge : plusieurs chapitres s'intitulent "entrée de (Untel)", comme un personnage qui fait son entrée sur scène. Nabe construit son récit en plaçant ses chapitres dans une composition extrêmement complexe, comme celle d'une mosaïque dont on aperçoit d'abord quelques pierres, avant de découvrir peu à peu, par un zoom arrière, le motif d'ensemble. 

J'avais trouvé le dernier tiers du tome 1 décevant sur plusieurs points, car je trouvais que Nabe commençait à dévier de son sujet lorsqu'il parlait d'Yves Loffredo ou de la vie privée de Taddéï. Je ne voyais plus le rapport avec le sujet de départ -les complotistes, ni ce que cela apportait à la compréhension de la « dissidence ». Mais quand on lit ce tome 2, on comprend que c'était indispensable pour voir l'évolution de ces personnages, la plupart du temps vers l'échec et le mensonge à soi-même. Il était indispensable de raconter comment le complotisme se nourrit des faiblesses de chaque individu (sa paresse, son ignorance, son orgueil, ses lâchetés petites ou grandes) et l'entraîne inexorablement vers le bas.

En faisant la chronique de la folie complotiste, en peignant cet immense tableau à la Jérome Bosch, Nabe nous entraîne dans une exploration de la laideur et du mal. Y a-t-il un meilleur sujet pour un romancier ? Y en a-t-il d'autres ?...

Si l'on prend par exemple l'épisode de la conférence à Lille avec Tariq Ramadan, Nabe nous rapporte d'abord ce qu'ils y ont dit, puis nous narre sa soirée en ville, pour le moins pas glorieuse : Ramadan refuse assez sèchement de dîner avec lui, puis Nabe refuse de dormir dans l'hôtel miteux qu'on lui a réservé, part chercher une femme pour la nuit, n'en trouve pas et atterrit finalement au Carlton. L'intérêt de cette scène est au premier abord de jouer sur la confusion de la littérature et de la vie : en effet, c'est au Carlton que DSK fut accusé, à la même époque, d'avoir organisé des partouzes avec des prostituées. On pourrait donc voir là un nouveau jeu sur la rencontre entre le narrateur et son héros. Mais cela serait gratuit, éculé même, tant le thème de la mince frontière entre réalité et fiction est aujourd'hui galvaudé. Quel écrivain à la mode ne nous en a pas rebattu les oreilles depuis dix ou vingt ans ?

Or, si Nabe raconte ces moments, ce n'est pas pour le plaisir de l'anecdote amusante ni par simple jeu « littéraire », c'est pour une raison beaucoup plus sérieuse. Juste après ce chapitre sur le Carlton, on découvre les réactions de LLP à cette conférence Ramadan/Nabe, les conspis accusant évidemment Nabe d'être payé par le Qatar et la Suisse. Or, l'intérêt d'avoir le récit détaillé de cette nuit dans Lille est de mesurer tout ce qui sépare les fantasmes conspis de la simple et banale réalité. C'est la seule façon de contrer le conspirationniste : raconter les faits le plus complètement possible, pour qu'on voie comment les conspis sont capables, presque en direct, de déformer la réalité. Puis qu'on s'aperçoive que s'ils déforment un évènement particulier, c'est qu'ils peuvent tout déformer. 

Autre exemple, peut-être plus flagrant, au début du livre : juste après l'échec du Renaudot, Nabe rapporte une longue discussion avec Patrick Besson, qui était membre du jury. On pourrait y voir une anecdote sur le pauvre auteur qui espérait avoir son prix, qui l'a raté de peu et qui prend à partie ses lecteurs pour se faire plaindre : regardez comme le Système me rejette etc. Mais cela n'aurait aucun rapport avec le sujet du livre, ce serait un aparté gratuit, fait par un auteur parisianiste qui, depuis son café germanopratin, ne parle que de son nombril.  Or, nous ne sortons pas du tout du sujet, à mon avis. Pas parce que le milieu parisien ferait lui aussi partie du « troupeau des porcs » ; mais parce que le témoignage de Patrick Besson montre que le Système ne s'acharne pas sur Nabe et qu'il n'y a même pas de Système !
Il n'y a que des jurés qui ont discuté, qui ont hésité, qui étaient prêts à récompenser L'Homme qui arrêta d'écrire. Et si au dernier moment, cela ne s'est pas fait, ce n'est pas parce qu'une éminence grise, depuis son bureau obscur, aurait passé un coup de téléphone, ni parce que les jurés se seraient conjurés contre ce salaud de Nabe. C'est tout simplement à la suite d'hésitations, de revirements, quasiment la faute à pas de chance. Cela ne s'est joué à rien. Dès le début de ce tome 2, Nabe nous donne ainsi une leçon d'anti-complotisme par les faits, comme pour s'en vacciner, alors qu'il aurait toutes les raisons de croire à une persécution contre lui. 
C'est aussi pour qu'il rapporte cette scène au café où lui et Besson prennent un verre à la table d'à côté de celle de BHL. Les complotistes imaginent ce dernier en grand maître du complot judéo-américano-atlanto-sioniste, alors que Nabe nous le montre en grand-père avec ses petits enfants, et en personnage inoffensif qui ne fait trembler que les gens qui veulent bien trembler devant lui.

*

L'une des séquences les plus belles du livres est aussi la plus inattendue : c'est celle que Nabe consacre à la lune. Un véritable dossier sur le sujet, mêlant biographie de Werner von Braun, analyses sur Kubrick, la science-fiction etc. Simples disgressions ? Respiration romanesque pour s'évader avant de redescendre sur terre ? En réalité non, car là encore, il y a un intérêt bien précis à ces chapitres : c'est de nous montrer tout ce qui sépare la pauvreté d'esprit, la paresse et la bêtise des conspis, qui ne produisent que leurs misérables théories sur le fake moon landing, de la curiosité insatiable Nabe, qui a travaillé vraiment sur la lune, comme sur n'importe quel autre sujet, en l'abordant dans tous ses aspects : dans l'histoire, dans la science, dans la politique et même dans l'imaginaire. J'ai par d'ailleurs apprécié ce passage où il s'interroge sur l'origine de la lune : comment s'est-elle formée ? L'article Wikipédia sur le sujet nous apprend qu'il n'y a pas aujourd'hui de réponse claire.
C'est son objectif Lune, si on veut, ou sa lune vue de façon objective.

(À mon grand désespoir de tintinophile, Nabe n'aime pas beaucoup Hergé, même s'il en parle un peu dans ce livre et l'avait évoqué dans J'enfonce le clou. Il y a pourtant tant de points communs dans leurs oeuvres ! À commencer par l'art de donner à chaque personnage un langage propre. L'atmosphère générale des Porcs est aussi celle de la fantastique séquence d'ouverture de L'Étoile mystérieuse, avec la même peur de fin du monde qui se propage. En fait, que sont les Porcs, sinon Tintin au pays des complotistes ? Heureusement, Nabe adore Valérian et Laureline, agents spatio-temporels. Ce qui nous rappelle, aussi, que le véritable agent spatio-temporel, c'est Nabe, qui nous fait voyager, chapitre après chapitre, dans la nébuleuse conspirationniste.)

En lisant ce livre, on en vient à se demander ce qu'est le complotisme. Qu'est-ce qui fait qu'on bascule dedans ? Pourquoi en vient-on à y croire ? Et surtout, j'ai cherché la réponse à cette question qui me taraude depuis un certain temps : les complotistes savent-ils qu'ils mentent ? Croient-ils à leurs mensonges ? À force de les répéter, finissent-ils par les croire vrais ? On peut toujours dire que c'est une question pour les philosophes, mais il me semble qu'elle est essentielle. Par quel vice secret s'acharne-t-on à cacher et se cacher la vérité ? Au fond du conspirationnisme, il y a toujours un négationnisme : mais comment fait-on pour nier la réalité contre tous les faits ?

Verlaine translucide, Nabe, 1985

Verlaine translucide, Nabe, 1985

C'est surtout dans la deuxième partie du livre que l'écriture nabienne prend toute son ampleur, et que Nabe se révèle à nouveau comme un grand écrivain au service de la vérité (ce qui est un pléonasme : est-il possible d'être grand si on ne sert pas la vérité ?). 

Nabe lui-même s'est demandé plusieurs fois comment définir ce nouveau style qu'il a mis au point spécialement pour les Porcs. Il se réfère aux œuvres en prose de Verlaine. J'ai donc cherché à quelle oeuvre il pouvait se référer. En parcourant Mes prisons ou Mes hôpitaux, je n'ai pas été frappé par une similitude avec le style des Porcs. Mais j'ai découvert, dans ces articles, nouvelles et autres contes un prosateur très libre et novateur, qui semble maladroit à première vue, qui commence des phrases apparemment impossibles à finir, à cause d'une syntaxe distordue que pourtant (je parle des phrases), comme un chat qui chute et fait des torsions sur lui-même, il parvient à faire retomber sur ses pattes. C'est par exemple le cas de ses Histoires comme ça (je parle bien de Verlaine, pas de Kipling), avec un passage comme celui-ci : 

« Le changement dont j’ai parlé, qui remontait donc à quelques jours avant son entrée en sa seconde convalescence, consistait en une sorte d’espèce de vague comme qui dirait relâchement dans les soins, j’entends dans les petits soins dont elle avait câliné, dodiné ses insomnies, ses réveils, ses mauvaises humeurs et ses enfantgâtismes. »

Ou dans un article « A propos du dernier livre posthume de Victor Hugo », cette désarticulation de la syntaxe sur les mots courtois, irrités et reproches : 

« Je me rappelle avoir, étant tout novice, écrit dans un taquin petit journal d’adolescents, l’Art (Lemerre, 1866), à propos justement de ces vers un peu gâteux, tout de même, on en conviendra, quelques lignes sincères qui m’attirèrent, lors de ma première « audience » place des Barricades, même année, de très courtois, mais je ne crus pas trop flatteur pour ma jeune vanité de croire irrités, reproches du Maître, jaloux de revendiquer le passage, objet de ma critique, comme très bon et bien voulu. »

Lautréamont m'a paru être une source d'inspiration plus flagrante, notamment son sixième chant ; je pense à un passage comme celui-ci, pour son jeu sur les notations auto-référentielles entre parenthèses : 

 « De quel droit en effet prétendrait-il gagner indemne sa demeure, lorsque quelqu’un le guette et le suit par derrière comme sa future proie ? (Ce serait bien peu connaître sa profession d’écrivain à sensation, que de ne pas, au moins, mettre en avant, les restrictives interrogations après lesquelles arrive immédiatement la phrase que je suis sur le point de terminer.) »

Ou encore : 

« M’emparant d’un style que quelques-uns trouveront naïf (quand il est si profond), je le ferai servir à interpréter des idées qui, malheureusement, ne paraîtront peut-être pas grandioses ! »

Si vous ne voulez pas me croire, allez lire vous-même.

*

Mais Nabe n'est pas l'homme à pasticher ce que les grands auteurs ont fait, sans quoi il ne serait qu'un imitateur. Il referait du XIXème siècle en moins bien. 

Or, Nabe cite aussi, tout à l'inverse, les articles qu'il n'a pas signés dans Nabe's News, qui seraient comme des expérimentations pour aboutir à une écriture brute de décoffrage, en prise directe sur l'actualité. Or, de quoi s'inspire ce style Nabe's News ?  À mon avis, du style, ou plutôt du non-style des blogs et des commentaires internet dont Nabe a reproduit abondamment les pires exemples ; cette anti-littérature web, cet atroce style 2.0 des anonymes qui n'arrêtent jamais d'écrire alors qu'ils ne savent pas écrire, constitue à l'évidence sa deuxième source d'inspiration. En fait, de même que les jazzmen jazzifient des chansons qui ne sont pas du jazz (Miles Davis avec Time After Time, entre mille autres exemples), Nabe élève au niveau littéraire un style anti-littéraire au possible. Or même dans les pires nullités, on peut trouver une qualité, en l'occurrence la spontanéité, puisque c'est écrit sans réfléchir ou presque et pour exprimer des réactions primaires. Le style actuel de Nabe est donc un mélange de grande prose poétique et de non-écriture internet. 

S'il n'y avait qu'un des deux éléments du mélange, Nabe serait soit un écrivain passéiste qui joue les grands hommes de lettres, avec un style précieux pour Figaro Magazine, soit un pauvre troll de forum de discussion. Mais il a réussi l'impossible (qui est ce qu'un artiste doit réussir) : c'est-à-dire à prendre le magma du parlé de son temps, et à le transformer en littérature. De cette façon, en le lisant, on a l'impression que tout est spontané et qu'il a juste dit ce qu'il avait à dire, sans fioriture. Or c'est bien le cas, mais il n'a pu le faire que parce que chaque mot est choisi. Pour l'artiste, l'inspiration est partout, et d'abord là où un non-artiste ne penserait pas à aller la chercher, pour mettre de la beauté là où il n'y en a pas. 

La deuxième partie du livre fait la part belle à des interviews que Nabe mène avec différents individus, la plupart n'étant pas des célébrités, mais des personnages influencés par les théories complotistes. Nabe retranscrit des discussions enregistrées sur dictaphone où il tente de comprendre comment ses interlocuteurs peuvent croire les « dissidents » sur les chambres à gaz ou le 11-septembre. C'est là qu'un des personnages du premier tome, Nicolas, le flic de la DCRI, va prendre toute son ampleur, en fournissant d'amples renseignements sur la traque de Merah par la police. Nabe a su rendre sa façon de parler. Je ne l'ai jamais rencontré mais on croirait entendre la bande audio, avec ses expressions typiquement parlées comme « voyons, qu'est-ce que je pourrais te dire encore ? » Nabe enregistre la police ! 

Il pousse même le procédé jusqu'à enregistrer sur le moment les conversations de deux groupes à des tables de café en passant de l'une à l'autre, et à mélanger habilement les deux discussions dans son chapitre. DJ Nabe mixe en direct ! 

Mais le morceau de maître, c'est bien sûr le dernier chapitre, la retranscription de la discussion entre Merah et le négociateur du RAID, qui constitue un sommet dans l'art de transposer le langage parlé. On croirait vraiment entendre parler les personnages ! C'en est si criant de vérité que c'en est drôle. Drôle et effrayant à la fois de lire un Merah qui parle comme un beur de banlieue « normal », avec ses phrases ponctuées par des « t'as vu » alors que c'est en même temps un djihadiste qui vient de tuer des militaires et des enfants, et qui est en train de préparer sa mort.  L'ensemble est construit comme un film d'espionnage où chacun manipule l'autre. Les deux hommes, Merah et le négociateur, sont proches à bien des égards -des Toulousains d'origine maghrébine, et seule une mince frontière les sépare, mince mais infranchissable. Au cours de la négociation, une reddition semble se profiler, jusqu'au retournement de situation final, qui achève cette tragédie du double et de la duplicité. Merah est un autre. 

Dans le 27ème livre, Nabe racontait comment il avait refusé de rédiger un Dictionnaire amoureux du jazz (et Hélène de s'exclamer : si encore ça avait été un « Dictionnaire amoureux de l'antisémitisme ! »). Avec ce deuxième volume des Porcs, Nabe poursuit ce qu'on pourrait appeler une Encyclopédie haineuse du conspirationnisme. Il a voulu que chaque page, chaque paragraphe, chaque phrase, soient une victoire contre la laideur et les mensonges du conspirationnisme.